Cette obstination, patente dans l'évolution des doctrines morales, à asseoir la Loi sur l'autonomie du sujet, confine au mythe et en tout cas révèle un mécanisme de défense... contre l'hétéronomie radicale de la loi, justement, en tant qu'elle provient du réel... Ce réel qui, lorsqu'il intervient, détermine le refoulement, soit l'effacement de la trace originelle au moyen du signifiant. Le signifiant tente alors de faire Loi. Mais refoulement et retour du refoulé n'étant qu'un, c'est justement le retour du signifiant à l'état de trace, de trace du réel, qui pose problème, voire qui fait symptôme. Dans le cas de l'angoisse, le réel intervient à nouveau : rien d'autre que cette présence palpable du désir, en tant qu'identique à la Loi - sinon son approche ne causerait pas l'angoisse.
"J’insiste sur ceci : qu’elle [la Loi morale] provient de ce que j’appelle le réel. Ce que j’appelle le réel en tant qu’il intervient, qu’il intervient quand il intervient, essentiellement comme Freud nous le dit, à savoir en élidant le sujet, en déterminant, de par son intervention même, ce qu’on appelle le refoulement... Ce dont il s’agit est non pas l’effacement des traces mais le retour du signifiant à l’état de traces, l’abolition de ce passage de la trace au signifiant qui est constituée par ce que j’ai essayé de vous faire sentir, de vous décrire par une mise entre parenthèses de la trace, un soulignage, un barrage, une marque de la trace. C’est ça qui saute avec l’intervention du réel. Le réel renvoyant le sujet à la trace, abolit aussi le sujet du même coup, car il n’y а de sujet que par le signifiant."LACAN, S.X, 27/02/1963