Angoisse, Masochisme, Sadisme, Objet a, 1963

 La connivence de l'angoisse avec l'objet (a) se rencontre exemplairement dans la position du sujet masochiste, lequel se pose (et même s'expose) comme un tel objet déchet, entièrement soumis à la volonté de jouissance de l'Autre. D'où l'angoisse certes, mais il s'agit là d'un fantasme dissimulant, selon Lacan, la véritable visée qui est l'angoisse de l'Autre. Car après tout le scénario fantasmatique est là pour échouer. Ce qui est vraiment cherché dit Lacan "c’est chez l’Autre la réponse à cette chute essentielle du sujet dans sa misère dernière, et qui est l’angoisse". Chez le sadique, l'angoisse (de la victime, mais aussi du grand Témoin, Dieu) est plus évidente puisqu'elle vient même au premier plan du fantasme, même si la dimension instrumentale de son travail, de son action, tend à en dissimuler la finalité.


"Le masochiste - je vous l’ai dit l’autre jour, la dernière fois - quelle est sa position ? Qu’est-ce que masque, à lui, son fantasme ? D’être l’objet d’une jouissance de l’Autre qui est  sa propre volonté de jouissance... D’être l’objet d’une jouissance de l’Autre qui est  sa propre volonté de jouissance... Qu’est-ce que cette position d’objet masque, si ce n’est de rejoindre lui-même, de se poser dans la fonction de la loque humaine, de ce pauvre déchet  de corps séparé, qui nous est ici présenté ? Et c’est pourquoi je dis que la visée de la jouissance de l’Autre est une visée fantasmatique : ce qui est cherché c’est chez l’Autre la réponse à cette chute essentielle du sujet dans sa misère dernière, et qui est l’angoisse... Si cette angoisse qui est la visée aveugle du masochiste, car son fantasme la lui masque, elle n'en est pas moins, réellement, ce que nous pourrions appeler l'angoisse de Dieu. Est-ce que j'ai besoin de faire appel au mythe chrétien le plus fondamental pour donner corps à ce qu'ici j'avance, et si toute l'aventure chrétienne n'est pas engagée sur cette tentative centrale, inaugurale, incarnée par un homme dont toutes les paroles sont encore à réentendre, d'être celui qui a poussé les choses jusqu'au dernier terme d'une angoisse qui ne trouve son véritable cycle qu'au niveau de celui pour lequel est instauré le sacrifice, c'est-à-dire au niveau du Père."
LACAN, S.X, 06/03/1963

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