Désir, Castration, Phallus, Père, 1961

 La castration est fondatrice du sujet du désir, en tant que celui-ci est manque, et en tant que ce manque est désigné par le phallus. Pourquoi ? Parce que le phallus est l'instrument même du désir élevé à la fonction de signifiant, et venant à ce titre à la place du possesseur dudit, soit le père mort, énonciateur de la loi.


"La castration et son problème sont identiques à ce que j’appellerai la constitution du sujet du désir comme tel : non pas du sujet du besoin, non pas du sujet frustré, mais du sujet du désir. Parce que la castration est identique à ce phénomène qui fait que l’objet de son manque, au  désir - puisque le désir est manque - est dans notre expérience identique à l’instrument même du désir : le phallus. Je dis bien que l’objet de son manque, au désir - quel qu’il soit, même sur un autre plan que le plan génital - pour être caractérisé comme objet du désir, et non pas de tel ou tel besoin frustré, il faut qu’il vienne à la même place symbolique que vient remplir l’instrument même du désir, le phallus, c’est-à-dire cet instrument, en tant qu’il est porté à la fonction de signifiant... Et pourquoi cet instrument est-il porté à la fonction du signifiant ? Justement pour remplir cette place dont je viens de parler : symbolique. Quelle est-elle cette place ? Eh bien, justement elle est la place du point mort occupé par le père en tant que déjà mort : je veux dire en tant que du seul fait qu’il est celui qui articule la loi, sa voix ne peut que défaillir derrière... La loi, pour tout dire, pour s’instaurer comme loi, nécessite comme antécédent la mort de celui qui la supporte."
LACAN, S.VIII, 10/05/1961

Analyste, Désir, Sujet, Autre, 1961

Le désir est aliéné au langage, c'est par là qu'il prend sens comme désir de l'Autre : pas seulement au génitif objectif (que désire-t-il cet autre ?) mais aussi au génitif subjectif : qui est ce sujet qui désire, autrement dit quel est le signifiant, évidemment inconscient, qui le représente ? C'est bien ce que doit représenter l'analyste pour l'analysant, non pas l'objet mais le signifiant du désir (Φ), et plus précisément cette place vide où il doit émerger. Par sa présence paradoxale et muette, l'analyste incarne ce manque à être qu'est le sujet en tant que barré, défaillant, là où il ne reste que « Ça ». Mais en tant qu'évanoui, le sujet s'articule quand-même à l'objet dans la structure du fantasme, l'objet étant lui-même la figure dégradée, dans l'imaginaire, du grand Autre ; l'analyste n'est donc pas tant supposé savoir, que supposé voir et faire voir, de cette place de sujet, l'objet du désir de l'Autre.


"C’est à la fois bien moins, mais aussi bien plus, de penser qu’il faut que nous tenions cette  place vide où est appelé ce signifiant, qui ne peut être qu’à annuler tous les  autres, ce Φ dont j’essaie pour vous, de montrer la position, la condition centrale dans notre expérience. Dans notre fonction, notre force, notre pouvoir, est certain, et toutes ses difficultés se résument à ceci : il faut savoir remplir sa place en tant que le sujet doit pouvoir y repérer le signifiant manquant. Et donc par une antinomie, par un paradoxe qui est celui de notre fonction, c’est à la place même où nous sommes « supposés savoir » que nous sommes appelés à être et à n’être rien de plus, rien d’autre, que la « présence réelle » et justement en tant qu’elle est inconsciente.
Au dernier terme - je dis «  au dernier terme » bien sûr, à l’horizon de ce qu’est notre fonction dans l’analyse - nous sommes là en tant que « Ça », « Ça » justement qui se tait et qui se tait  en ce qu’il manque à être. Nous sommes au dernier terme, dans notre présence, notre propre sujet au point où il s’évanouit, où il est barré. C’est pour cela que nous pouvons remplir la même place où le patient comme sujet lui-même s’efface, se subordonne, et se subordonne à tous les signifiants de sa propre demande...
Il s’agit de savoir si - pour que dans le transfert nous entrions nous-mêmes pour le sujet passif dans ce fantasme au niveau de S - cela suppose : – que d’une certaine façon nous  soyons vraiment cet S, –  que nous soyons au dernier terme celui qui voit petit(a), l’objet du fantasme, – que nous soyons capables dans quelque expérience que ce soit, et l’expérience à nous-mêmes  la plus étrangère, d’être en fin de compte ce « voyant », celui qui peut voir l’objet du désir de l’Autre, à quelque distance que cet Autre soit de lui-même."
LACAN, S.VIII, 03/05/1961

Phallus, Obsession, Fantasme, Désir, 1961

Comment le phallus Φ, pure fonction censée signifier le désir, peut justement fonctionner comme signifiant tout en étant "lui-même", par hypothèse, exclu du système signifiant ? Y pourvoie le phallus imaginaire, le petit ϕ, qui va servir d'unité de mesure autant que de mise en fonction libidinale des différents objet 'a'. C'est bien la présence du désir qui est en jeu, puisqu'il n'y a pas d'autre moyen pour la fonction phallique Φ que de se présenter sous cette forme en quelque sorte dégradée du ϕ imaginaire, lui-même emballant les objets 'a'. Cette mobilisation ne se fait pas de manière identique chez le sujet hystérique ou le sujet obsessionnel : refoulé au maximum chez le premier, pour préserver la pureté du désir, il s'étale à l'inverse de façon exponentielle (Lacan mentionne la fable de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf !) chez le second, principalement dans ses symptômes. La fonction refoulante de ces derniers est évidente, la mise à l'épreuve de la fonction Φ se soldant par une fuite en avant dans le phallicisme, un investissement pour le moins déroutant du signifiant, en fait une déroute. Mais c'est sans doute dans la perversion que le phallus comme signe du désir se manifeste le plus ouvertement comme objet du désir (à ce sujet Lacan risque l'expression d'« l’instance homosexuelle »).


"Il suffit de recourir à une observation analytique, quand elle est bien faite par un analyste, pour nous apercevoir que le ϕ c’est justement ce qui est sous-jacent à cette équivalence instaurée  entre les objets sur le plan érotique, que le ϕ est en quelque sorte l’unité de mesure où le sujet accommode la fonction petit(a), la fonction des objets de son désir... Il est un certain état, un certain niveau, une certaine forme, de réduire, de dégrader d’une certaine façon la fonction du signifiant Φ... (...)  À l’horizon de l’expérience de l’obsessionnel, il y a ce que j’appellerai une certaine crainte toujours de « se dégonfler » qui est à proprement parler en rapport avec quelque chose que nous pourrions appeler « l’inflation phallique » en tant que d’une certaine façon cette fonction chez lui du phallus Φ ne saurait mieux être illustrée que par celle de la fable de La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf : « La chétive personne - comme vous le savez - s’enfla si bien qu’elle en creva. »
LACAN, S.VIII, 26/04/1961

Phallus, Hystérie, Obsession, Fantasme, 1961

Le propre de l'hystérique est de maintenir son désir insatisfait "afin que l’Autre garde la clé de son mystère", Autre qu’elle cherche à compléter ou réparer à travers le drame de l’amour. C'est pourquoi dans la structure de son fantasme, l'objet a pour fonction de dissimuler sa propre castration imaginaire dans son rapport à l'Autre : a/-ϕ A. L'inverse chez l'obsessionnel, qui n'hésite pas à phalliciser l'Autre, outrageusement, pour mieux le rabaisser et attenter à son désir.

 

"Le dévouement de l’hystérique, sa passion de s’identifier avec tous les drames sentimentaux, d’être là, de soutenir en coulisse tout ce qui peut se passer de passionnant et qui n’est pourtant pas son affaire, c’est là qu’est le ressort, qu’est la ressource autour de quoi végète, prolifère tout son comportement. Si elle échange son désir toujours contre ce signe - ne voyez pas ailleurs la raison de ce qu’on appelle sa « mythomanie » - c’est qu’il y a autre chose qu’elle préfère à son désir : elle préfère que son désir soit insatisfait afin que l’Autre garde la clé de son mystère. (...) Ce que nous appelons dans l’obsession « agressivité » est présent toujours comme une agression précisément à cette forme d’apparition de l’Autre que j’ai appelée en d’autres temps « phallophanie » : l’Autre en tant justement qu’il peut se présenter comme phallus. Frapper le phallus dans l’Autre pour guérir la castration symbolique, le frapper sur le plan imaginaire, c’est la voie que choisit  l’obsessionnel pour tenter d’abolir la difficulté que je désigne sous le nom de « parasitisme du signifiant dans le sujet », de restituer - pour lui - au désir sa primauté, mais au prix d’une dégradation de l’Autre qui le fait essentiellement fonction de quelque chose qui est l’élision imaginaire du phallus."
LACAN, S.VIII, 19/04/1961

Phallus, Signifiant, Manque, Désir, 1961

Le symbole Φ désigne la place du signifiant manquant ; manquant en tant que verbal (d'où le terme privilégié de symbole), il est donc le signifiant du manque, le signifiant pur du désir. Même si le système de la langue comme tel ne manque de rien et ne comporte aucun inexprimable a priori (car tout ce qui est signifié par le sujet ne peut l'être d'abord, traduit et reçu, qu'au lieu de l'Autre), ce système n'existe qu'à travers la parole de sujets qui manquent nécessairement à dire, et s'abord à se dire, puisqu'un sujet ne peut s'introduire dans le système et l'utiliser qu'à s'y faire représenter par un signifiant toujours changeant. Subjectivement le manque de signifiant devient sensible avec la question, "qui suis-je ?", quand elle porte le doute sur l'être du sujet et ne trouve de réponse que métaphorique, à la fois réductrice et idéalisante, par exemple "je (ne) suis (qu')un enfant". Or par cette réponse (consciente) la question elle-même est élidée, reportée au champ de l'Autre (inconscient), sous la forme d'un "que veux-tu ?". C’est là qu’intervient le manque de signifiant dont il s’agit dans le Φ du phallus, comme la signification même, toujours énigmatique, du désir. En même temps un tel signifiant, quoique voilé et absent, garantit que le système signifiant fonctionne et signifie effectivement, n'est pas une machine bornée ou incontrôlable. Le phallus reste indicible, non verbal dans son principe même, et ne saurait apparaître "lui-même" en tant que symbole, sans que le système ne se bloque (sauf à se projeter dans un second temps, dans l'imaginaire, sur l'organe lui-même présent ou absent, autour de quoi s'élaborent les effets symptomatiques du complexe de castration proprement dit).


"Le rapport au signifiant est tel que si nous n’avons affaire, au niveau de la chaîne inconsciente, qu’à des signes, et si c’est d’une chaîne de signes qu’il s’agit, la conséquence est qu’il n’y a aucun arrêt dans le renvoi de chacun de ces signes à celui qui lui succède. Car le propre de la communication par signes est de faire de cet autre même à qui je m’adresse - pour l’inciter à viser de la même façon que moi l’objet auquel se rapporte ce signe - un signe. L’imposition du signifiant au sujet le fige dans la position propre du signifiant. Ce dont il s’agit, c’est bien de trouver le garant de cette chaîne, qui de transfert de sens de signe en signe, doit s’arrêter quelque part, ce qui nous donne le signe que nous sommes en droit d’opérer avec des signes. C’est là que surgit le privilège de Φ dans tous les signifiants... (...) Qu’est-ce à dire ? C’est qu’après tout, de tous les signes possibles, est-ce que ce n’est pas celui qui réunit en lui-même le signe, à savoir à la fois le signe et le moyen d’action et la présence même, du désir comme tel ? C’est-à-dire qu’à le laisser venir au jour dans cette présence réelle, est-ce que ce n’est pas justement ce qui est de nature, non seulement à arrêter tout ce renvoi dans la chaîne des signes, mais même à les faire entrer dans je ne sais quelle ombre de néant. Du désir, il n’y a sans doute pas de signe plus sûr, à condition qu’il n’y ait plus rien que le désir. Entre ce signifiant du désir et toute la chaîne signifiante s’établit un rapport d’"ou bien... ou bien"..."
LACAN, S.VIII, 19/04/1961

Demande, Analité, Désir, Phallus, 1961

La demande anale représente un renversement complet par rapport à la demande orale, puisque d'une part l'initiative en revient à l'Autre, d'autre part l'objet n'est plus à quérir mais "proprement" à donner, ou à retenir - c'est la source de toute discipline ! -, en tout cas quelque chose à désigner comme "le point radical où se décide la projection du désir du sujet dans l’autre" dit Lacan. L'Autre en a le contrôle, en effet, et le sujet s'efface dans l'objet évacué comme tel : c'est en ce sens qu'on peut parler du désir comme prégénital, marqué par la dépendance à la demande, tout spécialement dans le cas du névrosé. Cela ne veut pas dire que le désir génital serait affranchi de la demande, il en dérive tout autant (il n'y a pas de désir naturel), mais à un autre niveau symbolique. C'est-à-dire que l'objet phallus n'est pas un mode (qui serait plus avancé) de l'objet petit(a) imaginaire, "c’est un objet privilégié dans le champ de l’Autre" précise Lacan, qui vient à symboliser ce qui manque dans l'Autre pour être l’A "de plein exercice, l’Autre en tant qu’on peut faire foi à sa réponse à la demande". Sauf que le désir de l'Autre, au-delà de toute demande et de toute réponse, reste une énigme, et cette énigme est au fondement de toute la dialectique de la castration concernant le sujet.


"Le désir naturel a - à proprement parler - cette dimension de ne pouvoir se dire d’aucune façon, et c’est bien pour ça que vous n’aurez jamais aucun désir naturel, parce que l’Autre est déjà installé dans la place, l’Autre avec un grand A, comme celui où repose le signe. Et le signe suffit à instaurer la question : « Che vuoi ? », « Que veux-tu ? » à laquelle d’abord le sujet ne peut rien répondre, toujours retardé par la question dans la réponse qu’elle postule... L’objet dont il s’agit, disjoint du désir, l’objet phallus, n’est pas la simple spécification, l’homologue, l’homonyme du petit(a) imaginaire où déchoit la plénitude de l’Autre, du grand A. Ce n’est pas une spécification enfin venue au jour de ce qui aurait été auparavant l’objet oral, puis l’objet anal... C’est un objet privilégié dans le champ de l’Autre. C’est un objet qui vient en déduction du statut de l’Autre, du grand Autre comme tel. En d’autres termes, le petit(a) au niveau du désir génital et de la phase de la castration, le petit(a), c’est le A moins phi : (a) = A – ϕ . En d’autres termes, c’est par ce biais que le ϕ (phi) vient à symboliser ce qui manque à l’A pour être l’A noétique, l’A de plein exercice, l’Autre en tant qu’on peut faire foi à sa réponse à la demande."
LACAN, S.VIII, 15/03/1961

Demande, Oralité, Désir, Anorexie, 1961

La demande orale, définie comme demande d’être nourri adressée à un Autre - figure abstraite qui entend et répond - implique, en tant que parole, une réponse inversée de cet Autre : à la demande d’être nourri correspond la demande de se laisser nourrir. Cependant, entre ces deux demandes se creuse un écart, une discordance révélant que la demande est dépassée par un désir qui ne peut être satisfait sans s’éteindre. Pour préserver ce désir, le sujet peut refuser de se laisser nourrir, refus illustré notamment par le phénomène de l’anorexie. Or la nature inconsciente de ce désir, innommable et aveugle, ne saurait être que sexuelle, précisément parce que la demande ne vise pas la satisfaction du besoin, mais la consommation de l'Autre comme tel, autrement dit elle est cannibalique, sexuelle et cannibalique. Pourquoi ce passage à la limite de la demande débouchant sur le désir ? Parce qu'il se trouve que c'est cette même bouche qui a faim et qui exprime cette faim, parce que le besoin transite nécessairement par le médium de la parole, via la demande (réciproque), avant que de se radicaliser (au sens de : s'opposer) en désir d'ores et déjà retranché, inconscient : celui-ci n'apparait donc pas naturellement, dans le continuum de la tendance, comme surplus par rapport au besoin une fois satisfait, mais au contraire, dans la confrontation des demandes, comme négation potentielle de cette satisfaction. Comme créature du langage, le désir emprunte au langage sa puissance négativisante et ne se montre impérieux qu'à écarter d'abord ce qui ne lui correspond pas.

"Quoi en apparence qui réponde mieux à la demande d’être nourri que celle de se laisser nourrir ? Nous savons pourtant : – que c’est dans ce mode même de confrontation des deux demandes que gît cet infime gap, cette béance, cette déchirure où peut s’insinuer, où s’insinue d’une façon normale la discordance, l’échec préformé de cette rencontre consistant en ceci même, que justement elle est non pas rencontre de tendances mais rencontre de demandes, – que c’est dans cette rencontre de la demande d’être nourri, et de l’autre demande de se laisser nourrir que se glisse le fait manifesté au premier conflit éclatant dans la relation de nourrissage - que cette demande, un désir la déborde, – et qu’elle ne saurait être satisfaite sans que ce désir s’y éteigne, que c’est pour que ce désir qui déborde de cette demande, ne s’éteigne pas, que le sujet même qui a faim - de ce qu’à sa demande d’être nourri, réponde la demande de se laisser nourrir - ne se laisse pas nourrir, refuse en quelque sorte de disparaître comme désir, du fait d’être satisfait comme demande parce que l’extinction ou l’écrasement de la demande dans la satisfaction, ne saurait se produire sans tuer le désir. C’est de là que sortent ces discordances, dont la plus imagée est celle du refus de se laisser nourrir, de l’anorexie dite à plus ou moins juste titre mentale...
Et aussi bien, tout ceci n’est qu’évidence qui se confirme de partout. Comme vous le verrez à revenir en arrière et à repartir de la demande d’être nourri, comme vous le toucherez du doigt tout de suite dans ceci : que du seul fait que la tendance de cette bouche qui a faim - par cette même bouche - s’exprime en une chaîne signifiante la possibilité de désigner la nourriture qu’elle désire. Quelle nourriture ? La première chose qui en résulte, c’est qu’elle peut dire, cette bouche : « pas celle-là ! ». La négation, l'écart, le "j'aime ça et pas autre chose" du désir y entre déjà, là éclate la spécificité de la dimension du désir." LACAN, S.VIII, 15/03/1961

Contre-transfert, Demande, Compréhension, Inconscient, 1961

Le soi-disant contre-transfert n'est pas autre chose qu'une conséquence du transfert lui-même. Il n'est pas une "erreur" de l'analyste ou le résultat d'un moment d'"incompréhension", comme si la compréhension était un critère pertinent d'analyse, comme si elle ne se limitait pas à cautionner la demande consciente du sujet. Or justement la demande, en tant qu'originelle, loin d'être transparente, présente un au-delà et un en-deça inconscients au sujet qui se nomment respectivement la demande d'amour et le désir. Donc y répondre par quelque discours conscient relevant de la compréhension ne peut que se révéler inapproprié : si contre-transfert - ou plutôt résistance - il y a de la part de l'analyste, ce n'est nullement dans l'incompréhension mais dans la volonté de comprendre elle-même.

"En ce point, j’ai essayé de vous porter, en vous montrant ce qui résulte chez le sujet qui parle, du fait que ses besoins doivent passer par « les défilés de la demande », que de ce fait même, à ce point tout à fait originel, il résulte précisément ce quelque chose où se fonde ceci : que tout ce qui est « tendance naturelle » chez le sujet qui parle, a à se situer dans un au-delà et dans un en deçà de la demande. Dans un au-delà, c’est la demande d’amour. Dans un en deçà, c’est ce que nous appelons le désir, avec ce qui le caractérise comme condition, comme ce que nous appelons sa condition absolue dans la spécificité de l’objet qui le concerne : petit(a)..." LACAN, S.VIII, 15/03/1961

Analyste, Contre-tranfert, Désir, Mort, 1961

La sorte d'apathie qu'on attribue à l'analyste témoigne simplement de sa capacité à "faire le mort" au niveau de son i(a). Cela n'induit pas forcément son inertie mais plutôt une aptitude à "jouer" avec ce mort. Bien plus, cela suppose un désir intègre et fort, dès lors que l'analyste incarne l'objet fondamental (agalma) en jeu dans le fantasme du patient, et qu'il s'y tient. C'est en cela qu'il est directement impliqué dans le transfert, structurellement, quelque soit la couleur des sentiments induits momentanément au niveau d'i(a). Il n'y a donc pas lieu de parler de "contre-transfert", sauf à ce que l'analyste place - malencontreusement - son propre agalma dans le patient auquel il a affaire. 

"Si l’analyste réalise, comme l’image populaire, ou aussi bien comme l’image déontologique qu’on s’en fait, cette apathie, c’est justement dans la mesure où il est possédé d’un désir plus fort que ceux dont il peut s’agir, à savoir : d’en venir au fait avec son patient, de le prendre dans ses bras, ou de le passer par la fenêtre - cela arrive - j’augurerais même mal de quelqu’un qui n’aurait jamais senti cela, j’ose le dire... Le contre-transfert n’est plus considéré de nos jours comme étant dans son essence une imperfection... Le fait qu’il y a transfert suffit pour que nous soyons impliqués dans cette position, d’être celui qui contient l’ἄγαλμα [agalma], l’objet fondamental dont il s’agit dans l’analyse du sujet, comme lié, conditionné, par ce rapport de vacillation du sujet que nous caractérisons – comme constituant le fantasme fondamental, comme instaurant le lieu où le sujet peut se fixer comme désir. C’est un effet légitime du transfert. Il n’y a pas besoin là pour autant de faire intervenir le contre-transfert comme s’il s’agissait de quelque chose qui serait la part propre, et bien plus encore la part fautive, de l’analyste. Seulement je crois que pour le reconnaître, il faut que l’analyste sache certaines choses. Il faut qu’il sache en particulier que le critère de sa position correcte n’est pas qu’il comprenne ou qu’il ne comprenne pas... C’est en tant certes qu’il sait ce que c’est que le désir, mais qu’il ne sait pas ce que ce sujet, avec lequel il est embarqué dans l’aventure analytique, désire, qu’il est en position d’en avoir en lui - de ce désir - l’objet." LACAN, S.VIII, 08/03/1961

Transfert, Amour, Désir, Interprétation, 1961

Le transfert est présent dans l'analyse dès qu'on peut repérer dans les dires du sujet une "présence du passé". Non seulement ce phénomène se manifeste comme un soutien indispensable à la remémoration, mais il s'avère Immédiatement maniable par l'interprétation. Le transfert ne permet pas une simple présence du passé, par sa guise cette présence se fait acte, devient création. Il est un puissant levier pour faire surgir le désir à partir de l'amour. Tel Alcibiade déclarant publiquement son amour pour Socrate (par le biais d'un certain nombre de récits et anecdotes), mais se heurtant au désir énigmatique de celui-ci, étant éconduit d'un côté d'un côté se trouve reconduit de l'autre vers propre désir pour Agathon. Socrate, par son interprétation active, aura utilisé l'amour (de transfert) qu'Alcibiade éprouve à son égard, pour lui signifier son vrai désir.

"En même temps qu’on découvre le transfert, on découvre que si la parole porte comme elle a porté jusque-là, avant qu’on s’en aperçoive, c’est parce qu’il y a là le transfert... Que c’est de la position que lui donne le transfert que l’analyste analyse, interprète et intervient sur le transfert lui-même... C’est « une présence » - un peu plus qu’une présence - c’est « une présence en acte ». (...)
L’amour c’est ce qui se passe chez cet objet vers lequel nous tendons la main par notre propre désir,  et qui, au moment  où il fait éclater son incendie, nous laisse apparaître un instant cette réponse : cette autre main, celle qui se tend vers vous comme son désir... C’est dans la mesure où ce que Socrate désire il ne le  sait pas, et que c’est le désir de l’Autre, c’est dans cette mesure qu’Alcibiade est possédé par - quoi ? - par un amour dont on peut dire que le seul mérite de Socrate c’est de le désigner comme amour de transfert, de le renvoyer à son véritable désir."
LACAN, S.VIII, 01/03/1961

Désir, Amour, Sujet, Objet, 1961

L'amour se rattache à la question de ce que l'Autre peut nous donner : au-delà de telle demande formulée, l'amour est l'objet ultime de la demande, la présence de l'Autre comme telle. Cet Autre auprès duquel nous soupirons dans l'amour, de sujet à sujet en somme, n'est plus du tout présent dans le désir sinon comme objet, mais un objet impérieux, tyrannique, auprès duquel nous vacillons et même nous disparaissons comme sujets. Pendant que l'objet trône à son firmament, survalorisé, il remplit cette tâche paradoxale de "sauver la dignité du sujet" dit Lacan en le faisant apparaître, dans le désir, non plus comme sujet de la parole (sujet évanouissant), mais comme ce quelque chose d'unique et d'irremplaçable pouvant se parer du nom d'"individualité".

"Ce dont il s’agit dans le désir c’est d’un objet, non d’un sujet. C’est justement ici que gît ce qu’on peut appeler « ce commandement épouvantable » du dieu de l’amour qui est justement de faire de l’objet qu’il nous désigne quelque chose qui, premièrement est un objet, et deuxièmement ce devant quoi nous défaillons, nous vacillons, nous disparaissons comme sujets. Car cette déchéance, cette dépréciation dont il s’agit, c’est nous comme sujet qui l’encaissons. Et ce qui arrive à l’objet est justement le contraire, c’est-à-dire que cet objet, lui, est survalorisé et c’est en tant qu’il est survalorisé qu’il a cette fonction de sauver notre dignité de sujet, c’est-à-dire de faire de nous, autre chose que ce sujet soumis au glissement infini du signifiant, faire de nous autre chose que les "sujets de la parole"... L’individualité consiste tout entière dans ce rapport privilégié où nous culminons comme sujet dans le désir."
LACAN, S.VIII, 01/03/1961

Amour, Agalma, Objet, Désir, 1961

Vibrant hommage - on peut le dire - de Lacan à l'"objet partiel"- nommé "agalma" dans la bouche d'Alcibiade faisant l'éloge de Socrate -, comme étant la véritable trouvaille de la psychanalyse (qu'elle s'empresse aussi bien d'oublier), et surtout comme le vrai objet d'amour autant que le pivot incontournable du désir de l'homme - ce précieux, unique et incomparable objet que l'on ne peut que soustraire à toute concurrence ; et ceci - se scandalise Lacan - contre la conception idéaliste, génitaliste, subjectiviste, pour tout dire... philosophique de l'amour !

 

"Ἄγαλμα [agalma] peut bien vouloir dire parement ou parure, mais c’est ici avant tout objet précieux, bijou, quelque chose qui est à l’intérieur. Et ici expressément, Alcibiade nous arrache à cette dialectique du « Beau » qui jusqu’ici était la voie, le guide, le mode de capture sur cette voie du désirable. Et il nous détrompe, à propos de Socrate lui–même... Donc tout de suite Alcibiade pose qu’il met fort en doute que quelqu’un ait jamais pu voir de quoi il s’agit. Nous savons que non seulement c’est là le discours de la passion, mais que c’est le discours de la passion en son point le plus tremblant... Ce dont il s’agit, c’est du sens brillant, du sens galant, car le mot galant provient de gal, éclat en vieux français. C’est bien, il faut le dire, de cela que nous, analystes, avons découvert la fonction sous le nom d’objet partiel. C’est là une des plus grandes découvertes de l’investigation analytique que cette fonction de l’objet partiel. La chose dont nous avons à cette occasion le plus à nous étonner, nous autres analystes, c’est qu’ayant découvert des choses si remarquables tout notre effort soit toujours d’en effacer l’originalité...
Eh bien, c’est ça ! Nous avons effacé aussi, nous, tant que nous avons pu, ce que veut dire l’objet partiel, c’est-à-dire que notre premier effort a été d’interpréter ce qu’on avait fait comme trouvaille, à savoir ce côté foncièrement partiel de l’objet en tant qu’il est pivot, centre, clé, du désir humain : ça valait qu’on s’arrête là un instant. Mais non, que nenni ! On a pointé ça vers une dialectique de la totalisation, c’est-à-dire le seul digne de nous, l’objet plat, l’objet rond, l’objet total, l’objet sphérique sans pieds ni pattes, le tout de l’autre, l’objet génital parfait à quoi, comme chacun sait, irrésistiblement notre amour se termine ! Nous ne nous sommes pas dits à propos de tout ça : – que même à prendre les choses ainsi, peut-être qu’en tant qu’objet de désir, cet autre est l’addition d’un tas d’objets partiels, ce qui n’est pas du tout pareil qu’un objet total, – que nous-mêmes peut-être, dans ce que nous élaborons, ce que nous avons à manier de ce fond qu’on appelle notre « Ça », c’est peut-être d’un vaste trophée de tous ces objets partiels qu’il s’agit... Mais c’est quand même drôle qu’il y ait quelque chose que nous ayons complètement laissé de côté dans cette affaire – et c’est bien forcé de le laisser de côté quand on prend les choses dans cette visée particulièrement simplifiée - et qui suppose, avec l’idée d’une harmonie préétablie, le problème résolu : qu’en somme, il suffit d’aimer génitalement pour aimer l’autre pour lui-même.
Observez qu’aujourd’hui je suis moins en train de critiquer - c’est pour ça aussi bien que je me dispense d’en rappeler les textes - cette niaiserie analytique, que de mettre en cause ce sur quoi même elle repose. C’est à savoir qu’il y aurait une supériorité quelconque en faveur de l’aimé, du partenaire de l’amour à ce qu’il soit ainsi, dans notre vocabulaire existentialo-analytique, considéré comme un sujet. Car je ne sache pas qu’après avoir donné tellement une connotation péjorative au fait de considérer l’autre comme un objet, quelqu’un ait jamais fait la remarque que de le considérer comme un sujet, ça n’est pas mieux. Car si un objet en vaut un autre selon sa noèse à condition que nous donnions au mot « objet » son sens de départ, que ce soit les objets en tant que nous les distinguons et pouvons les communiquer, s’il est donc déplorable que jamais l’aimé devienne un objet, est-il meilleur qu’il soit un sujet ?Il suffit pour y répondre de faire cette remarque que si un objet en vaut un autre, pour le sujet c’est encore bien pire, car ce n’est pas simplement un autre sujet qu’il vaut. Un sujet strictement en est un autre ! Le sujet strict, c’est quelqu’un à qui nous pouvons imputer - quoi ? - rien d’autre que d’être comme nous cet être qui ἔναρθρον ἔχειν ἔπος [enarthron echein epos] qui s’exprime en langage articulé, qui possède la combinatoire et qui peut, à notre combinatoire, répondre par ses propres combinaisons, donc que nous pouvons faire entrer dans notre calcul comme quelqu’un qui combine comme nous...
C’est précisément à cela, à cette nécessité d’accentuer le corrélatif objet du désir en tant que c’est ça l’objet, non pas l’objet de l’équivalence, du transitivisme des biens, de la transaction sur les convoitises, mais ce quelque chose qui est la visée du désir comme tel, ce qui accentue un objet entre tous d’être sans équivalence avec les autres. C’est avec cette fonction de l’objet, c’est à cette accentuation de l’objet que répond l’introduction en analyse de la fonction de l’objet partiel...
Pour tout dire, si cet objet vous passionne, c’est parce que là-dedans, caché en lui il y a l’objet du désir : ἄγαλμα [agalma], le poids, la chose pour laquelle c’est intéressant de savoir où il est ce fameux objet, savoir sa fonction et savoir où il opère, aussi bien dans l’inter que dans l’intra subjectivité, et en tant que cet objet privilégié du désir, c’est quelque chose qui, pour chacun, culmine à cette frontière, à ce point limite que je vous ai appris à considérer comme la métonymie du discours inconscient où il joue un rôle que j’ai essayé de formaliser dans le fantasme [S◊a]. Et c’est toujours cet objet qui, de quelque façon que vous ayez à en parler dans l’expérience analytique - que vous l’appeliez le sein, le phallus, ou la merde - est un objet partiel. C’est là ce dont il s’agit pour autant que l’analyse est une méthode, une technique qui s’est avancée dans ce champ délaissé, dans ce champ décrié, dans ce champ exclu par la philosophie - parce que non maniable, non accessible à sa dialectique et pour les mêmes raisons - qui s’appelle le désir."
LACAN, S.VIII, 01/02/1961

Amour, Transfert, Analyse, Désir, 1960

Comment caractériser la science de l'analyste sinon, dans le sillage de Socrate, comme une science de l'amour ? Puisqu'il est supposé à l'analyste un savoir, certes paradoxal, de l'intimité de l'autre. Puisque le transfert lui-même consiste en un sentiment amoureux, dévoilé dans toute son ambivalence. Mais ce que découvre l'analysant, par-delà l'amour de transfert, ce n'est pas un quelconque bien ni un quelconque objet, mais proprement ce qui lui manque, soit la réalité de son propre désir.


"S’il [l'analysant] part à la recherche de ce qu’il a et qu’il ne connaît pas, ce qu’il va trouver c’est ce dont il manque... Nous savons donc bien que c’est comme ce dont il manque que s’articule ce qu’il trouve dans l’analyse, à savoir son désir, et le désir n’étant donc pas un bien en aucun sens du terme... C’est dans ce temps, dans cette  éclosion de l’amour de transfert, ce temps défini au double sens : chronologique et topologique, que doit se lire cette inversion, si l’on peut dire, de la position qui de la recherche d’un bien fait à proprement parler la réalisation du désir. Vous entendez bien que ce discours suppose que « réalisation du désir » n’est justement pas « possession d’un objet », il s’agit d’émergence à la réalité du désir comme tel." LACAN, S.VIII, 14/12/1960

Amour, Métaphore, Substitution, Objet, 1960

S'il est un échange, l'amour est d'abord un échange métaphorique, un mécanisme signifiant par lequel l'amant se substitue à l'aimé, ou encore le sujet (du manque) à l'objet (saturé de qualités). Ce qui est donc admirable dans l'amour, ce n'est pas en soi l'acte d'aimer ni le fait d'être aimé, c'est que miraculeusement l'aimé se fasse lui-même aimant et que l'amant devienne l'aimé : alors la métaphore se produit, une signification nouvelle est créée. Nulle symétrie malgré les apparences dans pareil processus, car le mouvement de substitution par lequel le désir répond au désir de l'autre n'est jamais prévisible. N'oublions pas la nature d'objet de l'aimé, initialement, que rien ne prédispose a priori à l'amour, et la substitution à laquelle il se prête demeure à jamais inexplicable. L'on ne saurait mettre en avant aucune causalité en terme d'avant et d'après, car la métaphore est instantanée ; aucun sens car le sens est justement produit par la métaphore ; aucun motif ni aucun intérêt utile. "C’est pour autant qu’Achille était dans la position de l’aimé que son sacrifice - ceci est expressément dit - est beaucoup plus admirable" : en effet il devient amant et se sacrifie en pure perte (alors qu'il aurait pu tranquillement rejoindre ses pénates) là où c'est en tant qu'aimante qu'Alceste se sacrifie pour son mari, note Lacan, opposant les deux personnages respectivement comme déraison et raison.

"L’amour comme signifiant - car pour nous c’en est un et ce n’est que cela - est une métaphore, si tant est que la métaphore nous avons appris à l’articuler comme substitution... C’est pour autant que - dans la fonction où ceci se produit - que l’ἐραστής [erastès] - l’aimant qui est le sujet du manque - vient à la place, se substitue, à la fonction de l’ἐρώμενος [erômenos] - qui est objet, objet aimé - que se produit la signification de l’amour..."
LACAN, S.VIII, 30/11/1960

"Cet « être de l’autre », dans le désir - je pense déjà l’avoir assez indiqué - n’est point un sujet... L’autre proprement, en tant qu’il est visé dans le désir, « est visé » ai-je dit - comme objet aimé... Je veux dire qu’essentiellement ce qui amorce ce mouvement, dont il s’agit dans l’accès que nous donne à l’autre, l’amour, c’est ce désir pour l’objet aimé qui est quelque chose que - si je voulais imager - je comparerais à la main qui s’avance : pour atteindre le fruit quand il est mûr, pour attirer la rose qui s’est ouverte, pour attiser la bûche qui s’allume soudain... Et cette main qui se tend, vers le fruit, vers la rose, vers la bûche qui soudain flambe, j’ai le droit d’abord de vous dire que son geste d’atteindre, d’attirer, d’attiser, est étroitement solidaire de la maturation du fruit, de la beauté de la fleur, du flamboiement de la bûche, mais que, quand dans ce mouvement d’atteindre, d’attirer, d’attiser, la main a été vers l’objet assez loin, si du fruit, de la fleur, de la bûche, une main sort qui se tend à la rencontre de la main qui est la vôtre, et qu’à ce moment-là c’est votre main qui se fige dans la plénitude fermée du fruit, ouverte de la fleur, dans l’explosion d’une main qui flambe, ce qui se produit là alors c’est l’amour !"
LACAN, S.VIII, 07/12/1960

Homosexualité masculine, Sublimation, Perversion, Amour, 1960

L'amour chez les anciens grecs, masculin, homosexuel, aristocratique, est un fait de culture qui n'en reste pas moins une perversion au regard de la norme sociale. Or une telle perversion qui mobilise certains interdits sociaux pour mieux les transformer au titre de la culture relève pleinement de la sublimation (au même titre que l'amour courtois au Moyen-Age).

"Si  la société entraîne par son effet de censure une forme de désagrégation qui s’appelle  la névrose, c’est dans un sens contraire d’élaboration, de construction, de « sublimation », disons le mot, que peut se concevoir  la perversion quand elle est produit de la culture. Et si vous voulez, le cercle se ferme :  la perversion apportant des éléments qui travaillent  la société,  la  névrose favorisant la création de nouveaux éléments de  culture. Cela n’empêche pas - toute sublimation qu’elle soit - que l’amour grec reste une perversion."
LACAN, S.VIII, 23/11/1960