Le concept lacanien de "trait unaire" est identique à ce que l'on trouve chez Freud au titre du "narcissisme des petites différences". Ce trait particulier, loin d'unifier un ensemble de qualités, n'est pas autre chose que le support d'une différence absolue. Le narcissisme, même imaginaire, n'existerait pas sans ce marquage symbolique, sans cette identification valant comme idéal-du-moi. Il n'y aurait pas non plus d'identification à l'objet (a), en cette occasion où le sujet (1) disparaît comme signifiant (-1), où l'objet lui-même se connote de son manque (-a).
"Ce qu’il [Freud] appelle narcissisme des petites différences, c’est la même chose que ce que j’appelle la fonction du trait unaire, car ce n’est rien d’autre que le fait que c’est à partir d’une petite différence - et dire « petite différence », cela ne veut rien dire d’autre que cette différence absolue dont je vous parle, cette différence détachée de toute comparaison possible - c’est à partir de cette petite différence, en tant qu’elle est la même chose que le grand I, l’idéal du moi, que peut s’accommoder toute la visée narcissique : le sujet constitué ou non comme porteur de ce trait unaire... C’est parce qu’il y a un sujet qui se marque lui-même, ou non, du trait unaire, qui est 1 ou –1, qu’il peut y avoir un ( –a), que le sujet peut s’identifier à la petite balle du petit-fils de Freud, et spécialement dans la connotation de son manque : « il n’y a pas », ens privativum... Le –1 constitutif de l’ens privativum, nous le voyons ainsi lié à la structure la plus primitive de notre expérience de l’inconscient, pour autant qu’elle est celle, non pas de l’interdit, ni du « dit que non », mais du « non-dit », du point où le sujet n’est plus là pour dire s’il n’est plus maître de cette identification au 1, ou de cette absence soudaine du 1 qui pourrait le marquer."LACAN, S.IX, 28/02/1962
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