Angoisse, Altruisme, Moi, Objet a, 1961

Ce que ne supporte pas le moi narcissique, par définition, c'est bien que son image puisse être abîmée... Comment, sinon en abîmant l'image du semblable avec laquelle celle du sujet est liée, comme cul et chemise pourrait-on dire, et même davantage en parlant d'identification ? L'altruisme ne serait donc qu'une couverture par laquelle le moi se protège... contre quoi, sinon de la dangerosité potentielle du désir, en particulier de l'objet petit 'a' auquel le sujet fait face dans la structure de son fantasme, objet de nature à perturber sinon "outrager" l'image. De sorte que la pitié, la compassion, pourrait servir de rempart ordinaire contre un mal bien plus redoutable pour le moi, à savoir l'angoisse, laquelle ne manquerait pas de surgir si l'image narcissique se trouvait menacée.


"S’il se laisse apercevoir, ce signal d’angoisse, c’est bien de l’alter ego, de l’autre qui constitue son « moi », que le sujet peut le recevoir. Il y a quelque chose ici que je voudrais pointer. Vous m’avez entendu longtemps vous avertir des dangers de l’altruisme. Méfiez-vous, vous ai-je dit implicitement et explicitement, des pièges du Mitleid, la pitié, de ce qui nous retient de faire du mal à l’autre, à « la pauvre gosse », moyennant quoi on l’épouse et on est pour longtemps emmerdés tous les deux... C’est qu’en fait le précieux Mitleid, cet altruisme - pour le sujet qui se méconnaît - n’est que la couverture d’autre chose, et vous l’observerez toujours à condition toutefois d’être dans le plan de l’analyse. Travaillez un peu le Mitleid d’un obsessionnel et ici le premier temps est de s’apercevoir (...) que ce qu’il respecte, ce à quoi il ne veut pas toucher dans l’image de l’autre, c’est à sa propre image."
LACAN, S.VIII, 14/06/1961

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