Phallus, Obsession, Fantasme, Désir, 1961

Comment le phallus Φ, pure fonction censée signifier le désir, peut justement fonctionner comme signifiant tout en étant "lui-même", par hypothèse, exclu du système signifiant ? Y pourvoie le phallus imaginaire, le petit ϕ, qui va servir d'unité de mesure autant que de mise en fonction libidinale des différents objet 'a'. C'est bien la présence du désir qui est en jeu, puisqu'il n'y a pas d'autre moyen pour la fonction phallique Φ que de se présenter sous cette forme en quelque sorte dégradée du ϕ imaginaire, lui-même emballant les objets 'a'. Cette mobilisation ne se fait pas de manière identique chez le sujet hystérique ou le sujet obsessionnel : refoulé au maximum chez le premier, pour préserver la pureté du désir, il s'étale à l'inverse de façon exponentielle (Lacan mentionne la fable de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf !) chez le second, principalement dans ses symptômes. La fonction refoulante de ces derniers est évidente, la mise à l'épreuve de la fonction Φ se soldant par une fuite en avant dans le phallicisme, un investissement pour le moins déroutant du signifiant, en fait une déroute. Mais c'est sans doute dans la perversion que le phallus comme signe du désir se manifeste le plus ouvertement comme objet du désir (à ce sujet Lacan risque l'expression d'« l’instance homosexuelle »).


"Il suffit de recourir à une observation analytique, quand elle est bien faite par un analyste, pour nous apercevoir que le ϕ c’est justement ce qui est sous-jacent à cette équivalence instaurée  entre les objets sur le plan érotique, que le ϕ est en quelque sorte l’unité de mesure où le sujet accommode la fonction petit(a), la fonction des objets de son désir... Il est un certain état, un certain niveau, une certaine forme, de réduire, de dégrader d’une certaine façon la fonction du signifiant Φ... (...)  À l’horizon de l’expérience de l’obsessionnel, il y a ce que j’appellerai une certaine crainte toujours de « se dégonfler » qui est à proprement parler en rapport avec quelque chose que nous pourrions appeler « l’inflation phallique » en tant que d’une certaine façon cette fonction chez lui du phallus Φ ne saurait mieux être illustrée que par celle de la fable de La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf : « La chétive personne - comme vous le savez - s’enfla si bien qu’elle en creva. »
LACAN, S.VIII, 26/04/1961

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