La sorte d'apathie qu'on attribue à l'analyste témoigne simplement de sa capacité à "faire le mort" au niveau de son i(a). Cela n'induit pas forcément son inertie mais plutôt une aptitude à "jouer" avec ce mort. Bien plus, cela suppose un désir intègre et fort, dès lors que l'analyste incarne l'objet fondamental (agalma) en jeu dans le fantasme du patient, et qu'il s'y tient. C'est en cela qu'il est directement impliqué dans le transfert, structurellement, quelque soit la couleur des sentiments induits momentanément au niveau d'i(a). Il n'y a donc pas lieu de parler de "contre-transfert", sauf à ce que l'analyste place - malencontreusement - son propre agalma dans le patient auquel il a affaire.
"Si l’analyste réalise, comme l’image populaire, ou aussi bien comme l’image déontologique qu’on s’en fait, cette apathie, c’est justement dans la mesure où il est possédé d’un désir plus fort que ceux dont il peut s’agir, à savoir : d’en venir au fait avec son patient, de le prendre dans ses bras, ou de le passer par la fenêtre - cela arrive - j’augurerais même mal de quelqu’un qui n’aurait jamais senti cela, j’ose le dire... Le contre-transfert n’est plus considéré de nos jours comme étant dans son essence une imperfection... Le fait qu’il y a transfert suffit pour que nous soyons impliqués dans cette position, d’être celui qui contient l’ἄγαλμα [agalma], l’objet fondamental dont il s’agit dans l’analyse du sujet, comme lié, conditionné, par ce rapport de vacillation du sujet que nous caractérisons – comme constituant le fantasme fondamental, comme instaurant le lieu où le sujet peut se fixer comme désir. C’est un effet légitime du transfert. Il n’y a pas besoin là pour autant de faire intervenir le contre-transfert comme s’il s’agissait de quelque chose qui serait la part propre, et bien plus encore la part fautive, de l’analyste. Seulement je crois que pour le reconnaître, il faut que l’analyste sache certaines choses. Il faut qu’il sache en particulier que le critère de sa position correcte n’est pas qu’il comprenne ou qu’il ne comprenne pas... C’est en tant certes qu’il sait ce que c’est que le désir, mais qu’il ne sait pas ce que ce sujet, avec lequel il est embarqué dans l’aventure analytique, désire, qu’il est en position d’en avoir en lui - de ce désir - l’objet." LACAN, S.VIII, 08/03/1961
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