"Freud apporte, aux fondements de la morale, que la loi fondamentale c’est la loi de l’interdiction de l’inceste... Il est important qu’il y ait un homme qui, à un moment donné de l’histoire, se soit levé pour dire : « C’est là le désir essentiel »... Freud désigne à la fois dans l'interdiction de l'inceste le principe de la loi fondamentale, de la loi primordiale, autour de laquelle tous les autres développements culturels ne sont que des conséquences et des rameaux, et en même temps l'identifie au désir le plus fondamental.
Ceci est toujours - par quelque côté - éludé, même quand Claude Lévi-Strauss, confirmant en quelque sorte dans son étude magistrale des Structures élémentaires de la parenté, le caractère primordial de la loi comme telle, à savoir l'introduction du signifiant et de sa combinatoire dans la nature humaine par l'intermédiaire des lois préférentielles du mariage réglé par une organisation des échanges qu'il qualifie comme « structure élémentaire », pour autant que des indications positives, préférentielles, sont données au choix du conjoint, c'est-à-dire qu'un ordre est introduit dans l'alliance, produisant une dimension nouvelle à côté de celui de l'hérédité en somme... même quand Claude Levi-Strauss fait cela, et tourne longuement autour de la question de l'inceste pour nous expliquer ce qui rend en quelque sorte nécessaire qu'il soit interdit, il ne va tout de même pas plus loin qu'à nous indiquer pourquoi le père n'épouse pas sa fille, c'est-à-dire qu'il faut que les filles soient échangées, pour ainsi dire.
Mais pourquoi le fils ne couche pas avec sa mère ? C'est tout de même là qu'il reste quelque chose de voilé... C’est bien dans l’ordre de la culture que joue la loi et que la loi a pour conséquence, sans aucun doute bien entendu, toujours d’exclure cet inceste fondamental, l’inceste fils-mère qui est le point central sur lequel Freud met l’accent...
C’est là aussi que je veux vous arrêter, vous montrant qu’en quelque sorte, ce que nous trouvons dans la loi de l’inceste, c’est quelque chose qui se situe fondamentalement, et comme tel, au niveau du rapport inconscient avec das Ding, la Chose. C’est pour autant que le désir pour la mère, disons, ne saurait être satisfait, parce qu’il est la fin, le terme, l’abolition de tout le monde de la demande qui est justement celui qui structure le plus profondément, et comme tel, l’inconscient de l’homme. C’est justement dans la mesure même où la fonction du principe du plaisir est de faire que l’homme cherche toujours ce qu’il doit retrouver mais qu’il ne saurait atteindre, c’est là que gît l’essentiel, ce ressort, ce rapport qui s’appelle : la loi de l’interdiction de l’inceste." (S.VII, 09/12/1959)
Inceste, Chose, Loi, Désir
Freud a établi que le désir de jouir de la Chose maternelle, désir d'inceste, est le désir fondamental - car structurellement le désir est désir de répétition, donc volonté de retrouver le tout premier objet, le corps à jamais perdu, mythique, de la mère : das Ding, la Chose. Il s'en déduit que l'interdit de l'inceste maternel est l'interdit fondamental, et qu'il a la primauté sur la prohibition de l'inceste paternel (préjudiciable surtout économiquement selon Lévi-Strauss). Si l'anthropologie - même structurale - n'en souffle mot, c'est d'une part en raison du caractère insu et inconscient d'un tel désir, littéralement inconcevable, que d'autre part il s'agit du crime "parfait" contre le sujet et contre le désir, celui qu'on ne voit pas et surtout qu'on ne dit pas, et dont personne ne saurait témoigner parce qu'il empêche le dire en général en supprimant l'étape de la demande dans la construction du désir. - Encore ce "crime" lui-même - décrivant un impossible : retrouver l'objet perdu - n'est-il qu'un mythe.
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